Algérie 19 mars 1962 (2)

Documentaire éblouissant de Jean Michel Meurisse sur la guerre d'Algérie, à la première personne, nourris d'événements autobiographiques, il dessine une page de l'histoire, la grande, celle qui reste à écrire pour comprendre cette guerre d'Algérie, pour comprendre ce deuil non fait et ce silence assourdissant...Celui de toute la classe politique qui s'est détournée de ce conflit du jour au lendemain laissant la société civile se débrouiller avec ses plaies, ses déchirements...On pense bien sûr à tous les pieds noirs arrivés sur le sol de la métropole pour la première fois, très souvent avec une immense amertume...Le sentiment d'avoir été lâchés, abandonnés. La transition devait se faire doucement, progressivement de façon à aider à la mise en place d'un gouvernement de transition...Elle s'est au contraire faite brutalement laissant l'OAS faire régner la terreur dans les rues d'Alger, offrant aux Algeriens la vue de ces corps dans un conflit devenu franco-français, toute à sa haine de voir l'Algérie abandonnée, ces hommes et ces femmes ne s'en remettront jamais...Et que dire des harkis, ces hommes dévoués à la cause française, parqués dans des camps en France mais trop souvent abandonnés à leur sort, en Algérie, dans les mains vengeresses des ALgériens, du FLN...

Meurisse nous dévoile tout cela humblement avec l'air de ne pas y toucher, accompagné dans sa réflexion par Benjamin Stora et Pierre Guyotat...Documentaire bouleversant où même le "quarteron de généraux à la retraite", à travers le témoignage de Saillan, démonte l'image que l'on s'en ait faite, pour laisser passer toute son amertume, d'un homme trahi, abandonné par De Gaulle...De Gaulle qui voyant qu'il ne pouvait convaincre les hommes du FLN et les rallier à sa cause, (dirigeants reçus en grand secret de nuit à l'Elysée) a décidé d'abandonner l'idée d'une Algérie Française...Plus de projet politique, les envies d'indépendance et de se débarasser du joug des colons français feront le reste...Dans la plus grande des confusions avec ce fameux putsh avorté et ces populations livrées à cette guerre de rues, ces attentats, un désastre...Ce qui devait être une opération de maintien de l'ordre fut une déroute, un carnage, une guerre sans nom, où la torture, la haine, les réglements de comptes ont laissé place à la plus grande amertume, incompréhension et pour finir impossibilité de faire son deuil...