Cher Ogres,

Je vais être honnête, je n'ai pas toujours été assidu, je vous avais même perdu de vue, mais vous êtes comme les amis véritables, on ne prend pas toujours de leurs nouvelles, mais on sait qu'ils sont là, bien au chaud, près du cœur. La dernière fois que je vous ai vus sur scène, c'était en 1997, à quelque chose près...Vous étiez jeunes, vous étiez beaux, et vous avez su le rester, grâce à cette énergie de tous les diables, cette rage, cette colère, cette conscience politique chevillée au corps...On avait bu un coup au comptoir du Transbordeur à Lyon, et vous nous aviez généreusement ramenés dans votre camion...
Alors je voulais pour tout ça, pour ce que vous êtes, vous remercier tout simplement...
Du "Café du Canal" (décidément votre plus belle chanson, non je plaisante) au "contes, vents et marées", la féérie reste intacte, carnaval sonore, chansons à partager, en pintes, en bolées et en rêves, la salle qui prévoyait un concert assis, quelle hérésie!, a bien vite chaviré, houle des grands soirs, farandoles et musiques valsées, on s'empoigne, on s'enlace, comme ce soir d'il y a 20 ans, j'avais alors 20 ans, heureux, insouciant, en colère déjà un peu peut-être, mais pour la forme...Ne me doutais pas de la tournure que prendraient les événements...
Le lendemain de votre concert, suis allé courir dans la brume de ma campagne, et me disais que je vous écrirais bien à vous, musicien hors pairs, que j'écrirais bien au grand Fred, à ce gouailleur, ce harangueur de foule, mobilisateur des consciences, je l'envie de pouvoir remuer les terreaux assoupis, éveiller les lumières de chacun, démanteler les peurs, la générosité n'a rien de démagogique, il faut être ferme sur le principe, ouvrir les bras est devenu un acte politique, il ne faut pas reculer devant l'affront national, il faut se serrer les coudes, serrer les cordes, inviter les gens à monter sur scène, il reste une guitare orpheline, il restera toujours des doigts malins pour donner de l'épaisseur à la chanson...Populaire, il en reste l'esprit et le sourire aux lèvres, n'ayons pas peur de nos valeurs, gardons ces airs bien en tête...Et croyez moi bientôt les flics auront du boulot, car tous les vagabonds parlent de révolution.... On rentre de Châtillon avec du Baume au cœur, on sait qu'il est encore possible de rêver, malgré les 20 ans qui nous séparent de l'autre rive, on empoigne à pleines lèvres vos chansons, et on tient bon !
A très bientôt j'espère...Je n'attendrai pas 20 ans promis !