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Un journal, des réflexions, des lecture, de la poésie et quelques envies

A la rencontre de soi...

Publié le 21 Octobre 2019 par F. B.

20/10/19

 

Ne pas avoir peur de soi. Ne pas avoir peur de perdre pied. Grande discussion avec C. hier soir sur ses chagrins intérieurs, sur ce désordre, sur ces tumultes. Il faut accepter de traverser le chaos pour approcher l’intériorité. Nous passons notre vie à vous être en maitrise. Maitrise de soi, maitrise de son corps, maitrise de ses émotions.  Cet idéal du moi est une icône suspendue au dessus de notre tête qui correspond à l’image de l’enfant idéalisé  vu au travers du prisme de nos parents. Cette image nous enferme, nous empêche parfois d’exister. Pour pouvoir fissurer le vernis de celle-ci, le travail sur soi et l’écriture sont nécessaires. Par travail sur soi, j’entends, tous les chemins de médiation détournés, permettant d’atteindre une image plus « vraisemblable » de son moi… Yung dirait que le moi puisse laisser place au « soi »… Envisager notre être coloré, mais aussi celui en noir et blanc fait d’ombre et de lumière. On ne veut pas voir, pas sentir cette monstruosité qui se cache au fond de nous, or l’approcher demande de trahir ses parents. Trahir ses parents pour s’approcher au plus près de ce que l’on est vraiment. Un être complexe, autrement plus complexe que l’image que l’on s’est fait de nous autrefois. Mais pour percevoir cette complexité, il faut entre dans l’altérité, sortir du fusionnel étiquetant que nous proposent nos parents. On peut trouver des réponses en littératures et dans tous les champs d’exploration qui ouvrent des perspectives. Mon rêve de la nuit proposait des champs nouveaux, des prairies apaisantes, des cols, des forêts, toutes sortes de terres d’accueil nouvelles.

Progresser dans la connaissance de soi, demande l’abandon d’une forme de maitrise qui nous donne l’impression de nous raccrocher au monde. Or elle n’est que l’illusion de l’idéal du moi. On a l’impression que si on lâche cette maitrise du « je » on sombre dans la dépression. Découvrir et s’approprier  son propre « je », passe par l’abandon de cette coquille, cette coquille de la prime enfance dans laquelle on s’est retrouvé enfermé. Il faut traverser ses chagrins intérieurs pour y parvenir. La dépression n’est rien d’autre, selon moi, que ces chagrins intérieurs non traversés. Elle est cette inconnue. Ce déni de nos souffrances tues. Je vais « tomber » en dépression. Qu’est-ce d’autre, sinon la peur de se connaitre véritablement soi-même. C’est accepter de tomber dans un monde inconnu qui nous fera sentir le sublime de notre personnalité, ce qui résonne au cœur vraiment, ce qui terrifie, ce qui vibre, ce qui assomme, ce qui tétanise, tout ce qui jubile, renait, tout ce que notre vie intérieure peut proposer de drames, de fêtes, de moments uniques. Il faut accepter le monstrueux que l’on porte en soi, cette part de notre personnalité que jamais on n’a voulu voir. Elle existe, elle est transgénérationnelle…Elle émane donc d’un mystère diffus, souvent tu. Prendre en charge notre propre agressivité, tous ces moments moins nobles où notre corps tressaille d’impatience, de colère, d’égoïsme, de rejet, de replis sur lui. Tous ces instants où l’on passe par des états intérieurs éloignés de ce que la bienséance morale accepterait, de ce que le jugement de nos parents permettrait. Assumer cette violence qui émane de la jalousie vécue dans les situations du quotidien…Etre en mesure de lire cet état intérieur de jalousie, voir la violence qui en résulte, pouvoir la verbaliser, l’extérioriser, avant qu’elle ne rejoigne le cortège de larmes jamais exprimées de la dépression. On doit trahir nos parents, nous sommes leur prolongement, mais aussi leur dépassement… Ils renoncent à travers nous. Nous allons au-delà de l’endroit où ils nous ont déposés. Nous allons plus loin de ce qu’ils ont prévu pour nous. Il faut sortir de leur regard, de leur champ d’action. Plus loin de ce qu’ils attendent de nous. Les trahir, voire les décevoir, mais être soi demande de savoir écouter ses mondes intérieurs. Ces paysages qui offrent de nouvelles perspectives à notre existence. La souplesse psychique acquise grâce au travail thérapeutique nous offre la malléabilité dont a besoin le corps pour accomplir un geste nouveau, une quête nouvelle. Le monde nouveau est en écriture. Tout en quête de sens, il ne s’écrit superbement que par la possibilité d’une mobilité intérieure. Le monde respire une poésie nouvelle quand notre regard sait se déplacer.

La beauté de l’ouverture de Salammbô de Flaubert vient de l’incroyable fertilité de ce regard intérieur qui se plonge dans un monde oriental nouveau, dans des parfums de jardins anciens, dans un univers que seule la poésie peut traduire…Cette assonance en « a » ouvre des espaces de noblesse d’un empire souverain fascinant… On voit les jardins, les terrasses, le banquet…On y est… Je pense que la vie ne mérite pas autre chose que cette quête incessante de la recherche d’un lieu, d’un air, d’une phrase, cette quête de sa propre autorité, de ce qui nous correspond au cœur, de ce que l’on sent être à soi… Se connaitre pour mieux épouser le monde…

L’écriture et la vie résident dans cette « perte d’équilibre »… mieux se connaitre, mieux se sentir, demande cet état intérieur confusionnel qui s’apparente à la chute, qui peut fait penser à la perte…Cette quête exige du lâcher prise, le vide est sous nos pieds. Va-t-on tomber ? On ne sait ce qu’on va trouver, mais on sait inconsciemment qu’on ne peut plus rester assis, sur ce bout de rocher, que notre être intérieur demande à se déployer.

 

A la rencontre de soi...
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