Journal de Creuse

Carte postale 10 avril 2018

Pour garder une idée colorée de nos vacances du bout du monde dans ces jardins de Creuse, il me faudrait relater ces parties de pêche endiablées où chaque enfant cramponné à sa canne, a l’impression dès que le bouchon frémit qu’il va relever une truite d’au moins 120 kilos…Et moi de redevenir enfant avec eux, de connaitre cette douce sensation de l’attente, quand le temps s’étirait nonchalamment sur les rives de mon enfance, que l’étang du lotissement devenait notre royaume… On enroulait les fils de nos cannes à pêches aux branches des arbres, on grattait la terre pour débusquer des vers de terre, on passait nos journées allongées à attendre la touche…

Perdus dans cette campagne de Fusinat, à quelques kilomètres du gite, nous passons l’après-midi au soleil, dans la fraicheur d’une nature qui commence à peine son éveil.

Nous nous souviendrons longtemps de voir les enfants courant à la recherche des messages du jeu de piste, afin de résoudre l’énigme d’un concert à venir…Big Flo et Oli à Grenoble au Zénith, le 21 avril 2018.

Nous nous rappellerons cette lumière perçant les nuages lors de nos promenades de l’après-midi, comme celle de l’ile de Vassiviere hier, cette ile magique aux mille œuvres d’art, abritant l’arche de Noé en son sein… Nous sourirons en pensant à cette partie de ricochets improvisée sur les berges de l’île… Chacun y va des propres ricochets pour animer sa vie…

11 avril 2018 Partie de pêche en Creuse

Après une journée magnifique autour du petit étang de Fusinat, nous revenons en vélo cette fois, Edgar et moi…

Ce matin nous avons pu explorer les environs, en nous promenant Claire et moi, dans le gite et ses environs…

Lande magnifique, encore groggy de l’hiver subi…Les arbres n’ont pas encore retrouvé leurs couleurs printanières, mais déjà on sent poindre les premiers frémissements…Les arbres centenaires déploient leurs ailes ramifiées de milles zébrures, vieux oiseaux blessés qui tentent d’ouvrir leurs branches en cascade, comme si la foudre les avait traversé. Je prends conscience par cette promenade matinale au frais, de la puissance de ces couleurs, les nuances de vert qui brillent au soleil et je comprends que la Creuse ait été le berceau de l’impressionnisme.

Crozant, les jardins de la Sedelle, prochaine destination de vacances, peut-être cet été…

J’aime cette campagne verdoyante, paisible, oubliée du monde, qui permet le repos et la pleine ressource des gens…Nous sommes trop longtemps coupés de nos ressources primaires en milieu urbain, trop loin de ce sol, de cette terre, de ces parfums. Sans tirer des plans sur la comète, je sens au plus profond de mon être, qu’il me faudra me rapprocher de cette terre pour être en cohérence avec moi-même, pour sentir ma propre sève.

6h30 12 avril

Bourrasque d’oiseaux qui chantent comme s’accordent les violons, soudainement, tous ensembles… Ils saluent la première lueur du soleil, la pâleur d’un jour nouveau. On ne peut pas parler de rayon, c’est une lumière diaphane, une lueur blanche qui doucement se pose sur les rochers gris, un voile qui se diffuse en écharpe et éveille peu à peu chaque recoin de la nature. L’oiseau ne s’y trompe pas, il y voit une occasion de célébrer le jour qui se lève, une confiance mutuelle entre la lumière et ce chant qui la célèbre… Si l’on dit qu’il n’y a plus d’oiseaux en France, la Creuse et le plateau de Millevaches est encore une fois un coin préservé…Ici tout semble au repos, à l’abri de la vitesse et de l’infame modernisation…Alors certes on peut dire que ses habitants peuvent se sentir délaissés, oubliés…Le train de la France de Macron est parti depuis longtemps déjà, les laissant sur le quai…Ici nombres d’habitations tombent en ruine. Le lierre et les buissons font le reste…La nature engloutit toute construction du début du siècle, oubliée depuis…Aucune autoroute ne traverse le département, tout un symbole…Seul le chemin sinueux et escarpé sillonne ces contrées…Le pas de l’homme est encore ce que l’on fait de plus sûr…

Hier nous avons passé la journée à Aubusson, où nous souhaitions visiter le musée des tapisseries. Arrivés à midi, nous n’avions pas regardé attentivement les horaires. Nous sommes donc allés nous promener par les rues piétonnes et  avons vu une annonce à 66 000 euros d’une petit maison dans le secteur de Crocq. Nous sommes entrés dans l’agence et nous avons donné notre nom au gérant de l’agence. Très sympathique il nous expliqué les différents coins, le sud et son plateau de Millevaches, un décor proche du Canada, l’Ouest et Crozant, ses toiles impressionnistes…Aubusson la Creuse des vallons, le nord plus plat, les cultures…

On se prête à rêver d’une maison avec un jardin où nous pourrions venir tous les été, randonner, écrire, se couper du monde, un lieu qui soit le havre de paix dont nous avons tant besoin. Un Guipe Creusois. Voilà ce que l’on souhaite, quelques chambres, un bureau où je puisse écrire, passer du temps. Me lever au chant de l’oiseau, battre la campagne aux premières heures du jour, embrasser cette nature qui offre tant à celui qui sait l’observer, remonter par les petits sentiers, se sentir vieillir en harmonie avec les creux, les bosses, les failles et son propre sillon, que le temps ne soit plus celui qui ronge, qui manque, qui court devant, mais un allié solide qui par sa fuite nous engage sur les chemins d’une certaine philosophie…Qu’il soit possible sereinement de se dire, de s’écrire, prendre le temps du repos véritable, quand rien ne presse, et que seuls les levers et couchers du soleil rythment la journée. C’est ici que nous trouverons ce lieu en lien avec  les saisons, c’est certain. Ni trop au nord, ni trop au sud, à mi-temps de la France, un lieu hors du tourisme et de l’industrie, préservé de la course à l’échalote de notre société, cette fameuse modernité, un lieu qui a gardé son identité.